Les dettes et les obligations découlant de la procédure de divorce peuvent être réglées de manière choisie par les débiteurs, a dit la Cour européenne des droits de l'homme, dans une décision qui étend les dispositions du droit à la propriété en recouvrement de créances.
La villa à Valbonne
Bernard Milhau et D.P. ont convenu une séparation de biens des époux quand ils se sont mariés en 1970. D.P. a demandé le divorce en 2001, exigeant des biens d'une valeur de plus de 1.000.000 €. M. Milhau possédait un grand nombre de biens immobiliers, sa principale source de revenus et, pour cette raison, M. Milhau voulait régler toutes les revendications financièrement plutôt que par la confiscation des biens.
Au cours de la procédure de divorce, M. Milhau a acquis une villa à Valbonne, qu'il a évaluée à 228.000€. Le tribunal français a accordé le divorce peu de temps après l'acquisition de la villa, attribuant cet immobilier à D.P. dans le cadre de la compensation. M. Milhau a interjeté appel et a gagné par la décision de la Cour d'appel qui a jugé que la rémunération de D.P. était trop importante et l'inclusion de la villa de Valbonne était injuste, car elle avait été acquise au cours de la procédure de divorce. A la place de la villa, D.P. a reçu la somme de 200.00€.
D.P. a fait appel devant la Cour de cassation française, qui a statué que la villa doit encore être considéré comme un bien commun qui doit lui être accordée. Cette décision a conclu la procédure de divorce, mais M. Milhau a tenté de rouvrir les procédures et a demandé à la Cour constitutionnelle d'examiner une enquête judiciaire pour déterminer si les dispositions du Code de la famille français, qui empêchent un débiteur de décider quelle partie de leur patrimoine il veut consacrer au paiement des dettes, est constitutionnel. La Cour constitutionnelle n'a pas réouvert la procédure.
La Cour des droits de l'homme étend les droits des débiteurs
M. Milhau a déposé une plainte à la Cour européenne des droits de l'homme, pour violation de ses droits de propriété, prévue à l'article 1 du Protocole I de la Convention, par les tribunaux français qui l’ont dépossédé de la villa. Dans son verdict du 10 juillet, la Cour a établi une distinction entre la revendication et le paiement les indemnités. Elle a soutenu que la revendication fait bien partie de la compétence des juridictions nationales, mais que la décision sur la façon de payer les indemnités, lorsqu'il existe des options, est un droit du débiteur.
Les juges ont reproché aux tribunaux français de ne pas considérer la capacité (et l'insistance) de M. Milhau pour compenser son ex-femme financièrement. En effet, M. Milhau avait offert, pour compensation de D.P., la pleine valeur de sa demande en cash, bien que les tribunaux inférieurs n'ont pas proposé une offre.
La Cour de Strasbourg a également noté que la loi française, en vertu de laquelle les divorces sont jugés - l'article 275 du Code civil français -, permet que les dettes soient payées en utilisant l’immobilier afin d'accélérer et de faciliter la résolution des cas plus faciles de créances financières. Par conséquent, l'offre de M. Milhau à payer les demandes d'indemnisation en euros était l'option la plus rapide pour réaliser l'objectif de l'article 275, et ne pas le permettre était contraire à l'objectif de la loi. La Cour a également noté que la décision de 2011 de la Cour constitutionnelle française a indiqué que les biens devaient être utilisés pour régler les revendications uniquement quand la compensation monétaire était impossible pour le débiteur.
La Cour des droits de l'homme a estimé que la France avait mal équilibré l'intérêt général de l'Etat et les intérêts des individus dans cette affaire. M. Milhau a été contraint de porter un fardeau injuste en renonçant à son bien immobilier pour D.P. La Cour lui a alloué 10.000 € de dommages et intérêts.
Dans ce cas, la Cour a, d'une façon très intéressante, étendu les dispositions du droit à la propriété pour couvrir la question du recouvrement et du paiement des dettes. Il a souligné que le débiteur, lorsque cela est possible, a le droit de choisir la forme dans laquelle il ou elle veut payer une dette.
Dominika Bychawska-Siniarska
Article publié à l'origine dans l'annexe «Avocat» à «Dziennik Gazeta Prawna"