Selon la Fondation d'Helsinki des droits de l'homme (FHDH), la crise constitutionnelle qui dure depuis plus d'un an constitue une grave menace pour l'indépendance de l'ensemble du système judiciaire.
Le bureau du rapporteur spécial sur l'indépendance des juges et des avocats des Nations Unies a été créé en 1964. La rapporteuse, Monica Pinto, a pour mission de surveiller le statut et la protection accordés aux juges et avocats. La rapporteuse reçoit des informations de la part des États membres des Nation Unies concernant de supposées violations dans ce domaine, effectue des visites officielles dans les pays et rédige des rapports.
Une lettre de Pologne
Dans sa lettre adressée à la rapporteuse, la FHDH signale la crise constitutionnelle causée à la fois par les changements apportés aux lois sur le Tribunal constitutionnel et la désignation de juges ayant obtenus les postes laissés vacants en 2015. La crise qui en résulte représente un grave danger pour la position du Tribunal constitutionnel et compromet l'efficacité de son travail.
"Sans un Tribunal constitutionnel effectif, toutes les garanties de protection des droits de l'homme deviennent une façade vide", peut-on lire dans la déclaration de la FHDH.
La FHDH se réfère également à la grâce présidentielle accordée à l'ancien directeur du Bureau central anti-corruption en novembre 2015. Le président l'a gracié au cours des procédures légales, avant que l'affaire ne puisse être entendue devant un tribunal de deuxième instance.
En agissant ainsi, le président entendait "libérer le système judiciaire de cette affaire", pour reprendre ses propos. Cette décision a soulevé une importante polémique et a été perçue par certains avocats comme un moyen pour l'exécutif de faire pression sur le judiciaire.
Contraire à la constitution
La FHDH a également évoqué l'amendement prévu pour la loi sur le Conseil national de la justice (CNJ). Le projet de loi a pour objectif d'apporter un changement majeur au processus de désignation judiciaire. Jusqu'à présent, la désignation du meilleur candidat à un poste judiciaire parmi toutes les candidatures soumises revenait au Conseil national de la justice, et le président nommait le candidat en question.
En vertu de la nouvelle loi, le CNJ devra présenter au président deux candidats pour un poste judiciaire. Selon la FHDH, cette solution affectera négativement l'indépendance du corps constitutionnel (le CNJ) et portera atteinte au principe d'indépendance judiciaire.
"Le projet de loi est contraire à la constitution, qui prévoit explicitement que le pouvoir du président est de nommer et non d'élire un juge", a déclaré la FHDH.
La Fondation d'Helsinki a également cité de nombreux exemples d'observations faites par des responsables politiques et des membre du Cabinet au sujet des avocats et des juges en fonction.
La FHDH demande à la rapporteuse spéciale d'enquêter sur la situation de la Pologne et, si possible, d'émettre des recommandations sur les récents changements et incidents législatifs portant atteinte à la dépendance judiciaire.
La lettre est consultable ici.