Technologies et droits

Hongrie: le Parlement européen appelle le gouvernent de Viktor Orbán à retirer sa loi anti-ONG et vote en faveur de l'activation de l'article 7

Mercredi dernier, le Parlement européen a adopté une résolutio qui pourrait entraîner la prise de sanctions contre le gouvernement hongrois, accusé d'avoir bafoué les valeurs fondamentales de l'UE: la démocratie, les droits de l'homme et l'état de droit.

by Israel Butler
La résolution appelle, le gouvernement hongrois à retirer son projet de loi anti-ONG, entra autres. Une immense victoire pour Liberties. La résolution prévoit également l'activation l'article 83 du règlement du Parlement européen (PE), celle-ci pouvant entraîner la prise de sanctions contre la Hongrie, en vertu du mécanisme prévu à l'article 7. Ce serait la première fois que cet article serait activé.

L'article 83 du règlement

L'article 7 du traité de l'UE prévoit la prise de sanctions contres des gouvernements des pays membres de l'Union européenne, lorsque ceux-ci portent gravement atteinte aux valeurs fondamentales de l'UE. Mais avant que les gouvernements ne soient effectivement punis, la route est assez longue. C'est aux gouvernements nationaux, réunis au Conseil de l'UE, que reviennent l'ensemble des décisions. L'article 7(1) permet aux gouvernements de déterminer s'il y a un "risque évident" de violation des valeurs de l'UE. L'alinéa 2 dudit article permet quant à lui aux gouvernements de déterminer si une grave violation des valeurs de l'UE est actuellement en cours. L'alinéa 3, quant à lui, leur permet de voter sur la prise de sanctions contre le pays concerné.

L'article 7 peut être activé par la Commission, un groupe de gouvernements ou par le Parlement européen. En d'autres termes, chacun de ces acteurs ou groupes d'acteurs est en mesure, en invoquant officiellement l'article 7, de mettre la Hongrie à l'ordre du jour du Conseil de l'UE. Et c'est à ce stade précis que l'article 83 du règlement du Parlement européen (PE) intervient. Cet article définit le processus qui permettrait au aux eurodéputés de soumettre le cas de la Hongrie au Conseil de l'UE, en vertu de la procédure de l'article 7.

Et après?

Le PE conduit la plupart de ses travaux à travers des comités qui traitent de domaines politiques particuliers. En vertu de l'article 83 du règlement, la Commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures doit présenter une proposition de résolution qui active officiellement l'article 7. Celle-ci est ensuite votée par l'ensemble des membres du Parlement. En vue d'être adoptée, elle doit recueillir la majorité des deux tiers des eurodéputé.e.s.

Si la résolution est adoptée, l'article 7 peut être activé. Cela signifie que les gouvernements nationaux auront un débat au sein du Conseil, portant sur le cas de la Hongrie, à l'issue duquel ils voteront pour déterminer si oui ou non les valeurs de l'UE encourent un risque de grave violation dans ce pays. Pour que la prise de sanctions soit ensuite rendue possible, les gouvernements devront également voté sur l'alinéa 2 de l'article 7. Et c'est là que les choses se compliquent: il faut obtenir l'unanimité parmi les gouvernements, et celui de la Pologne, qui lui aussi entrave l'état de droit dans son pays, viendrait sans doute au secours de la Hongrie.

Le résultat du vote: une victoire écrasante

La résolution a été adoptée avec une majorité impressionnante: 393 votes pour, 221 contre et 64 abstentions. Les eurodéputés du parti du gouvernement hongrois, Fidesz, sont membres du groupe politique le plus représenté au PE, le Parti populaire européen (PPE). Jusqu'à présent, la PPE avait largement défendu Fidesz face critiques au sein du PE: soit en bloquant des résolutions, soit en les "allégeant". Mais les résultats du vote montrent à quel point les divisions ont gagné le PPE sur cette question, ses membres étant de plus en plus nombreux à ne pas souhaiter être associés à un gouvernement qui ne respecte pas les droits, la démocratie et l'état de droit. Les eurodéputés du PPE qui souhaitaient se prononcer sur la Hongrie sont parvenus à obtenir la permission d'une vote libre, et près de 70 d'entre eux.elles ont voté en faveur de la résolution, 40 faisant le choix de s'abstenir.

Même si les gouvernements nationaux ne parviennent pas à adopter des sanctions contre la Hongrie, les relations politiques du pays risquent de se compliquer à Bruxelles. Les gouvernements et eurodéputés doivent travailler avec leurs homologues venus d'autres pays en vue d'éviter d'être mis à l'écart lors des négociations des nouvelles lois et politiques de l'UE. Se voir catégoriser de "violateur des droits" risque d'éloigner les potentiels alliés, ce qui réduirait fortement l'influence de la Hongrie sur les affaires de l'UE.

Ce que Liberties a fait

Le 11 avril dernier, Liberties a lancé une pétition à travers le site Avaaz.org, appelant le Parlement européen à adopter une résolution pour exhorter le gouvernement hongrois à retirer son projet de loi, en vertu duquel les ONG percevant des financements de l'étranger seraient tenues de se déclarer "comme agents étrangers". Aux côtés de l'Union hongroise des libertés civiles (UHLC) et le Comité d'Helsinki de Hongrie (CHH), nous nous sommes entretenus avec différents groupes politiques, dont la direction de l'EPP, afin d'expliquer quelle était la situation en Hongrie. Nous avons également convaincu les ONG à Bruxelles d'intégrer notre appel dans une déclaration publique adressée au Parlement, appuyée par plus de 500 ONG européennes. Nous avons par la suite préparé et publié un avis juridique, en collaboration avec le European Centre for Not-for-Profit Law, afin d'expliquer dans quelle mesure le projet de loi anti-ONG, en cas d'adoption, constituerait une atteinte au droit communautaire. Enfin, nous avons formulé des recommandations détaillées aux parlementaires portant sur les points à intégrer à la résolution.

État de droit fragilisé en Hongrie: comment en sommes-nous arrivés là?

Depuis son ascension au pouvoir, en 2010, le premier ministre de la Hongrie, Viktor Orbán, démonte la démocratie, morceau par morceau. Il a pris le contrôle du service médiatique public et fait taire les critiques au sein de la plupart des médias privés en les menaçant à coup d'amendes, d'impôts punitifs et/ou de fermeture. Il a protégé son gouvernement des actions en justice en instaurant une nouvelle Constitution, en plaçant ses alliés politiques au sein de la Cour constitutionnelle et lui retirant certains de ses plus importants pouvoirs. Et pendant tout ce temps, il a continué de remplir les poches de ses proches issus du monde des affaires hongrois, et ce à travers un système politique profondément corrompu.

Derniers faits d'armes: le gouvernement hongrois a d'abord adopté une législation ayant pour but de fermer l'Université d'Europe centrale, avant de s'attaquer aux ONG de défense des droits de l'homme, de protection de l'environnement ou spécialisées dans la lutte anti-corruption. Pour ce faire, le gouvernement a proposé une loi anti-ONG "à la russe", en vertu de laquelle les ONG percevant plus de 23000 euros par an de dons en provenance de l'étranger doivent se déclarer en tant qu' "agents étrangers". Le gouvernement a déjà commencé à stigmatiser les ONG en les qualifiant d' "agents". Les attaques d'Orbán visant les ONG ont bien pour but de faire taire les quelques voix restantes, à même de critiquer ses lois et politiques, lorsque ces dernières portent atteinte aux normes européennes en matière de droits de l'homme.

Les ONG sont essentielles pour la démocratie, les droits de l'homme et l'état de droit. Ce sont elles qui veillent à ce que les gouvernements n'enfreignent pas les lois et respectent les droits de leur peuple. Ce sont elles qui informent le public sur les abus de pouvoir des autorités et sur les détournements de fonds publics. Ce sont elles qui aident le grand public à s'organiser pour discuter avec leurs élus et exprimer leur point de vue d'une seule et même voix.

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