Dans le cadre de la dernière Journée internationale des victimes des disparitions forcées, l'ONG espagnole Rights International, membre de Liberties, a préparé un quiz sur la manière dont les autorités espagnoles traitent cette question. La version définitive du quiz se penche plus particulièrement sur cinq question, mais pas uniquement. Voici dix autres questions sur lesquelles nous avons travaillé, et dix recommandations. Cela constitue un moyen d'évaluer et identifier ce que les autorités espagnoles ont fait afin d'enquêter sur les disparitions forcées qui se sont produites au cours de la Guerre civile et lors du régime franquiste, et ce vis-à-vis des obligations internationales de l'Espagne. Voici donc ce que l'Espagne devrait faire :
- Cesser d'appliquer la Loi d'Amnistie de 1977 pour ceux responsables des disparitions forcées, cela constituant une grave violation des droits humains.
- Considérer, dans le respect du droit international, qu'une disparition forcée ne prend fin que lorsqu'une personne est retrouvée vivante, que sa dépouille est retrouvée ou que son identité est établie.
- Incorporer les disparitions forcées dans le Code pénal, en tant que crime international : irrévocable et puni comme un crime d'une extrême gravité.
- Créer une commission d'experts indépendants en vue d'établir la vérité concernant les violations des droits humains passées, dont les disparitions forcées.
- Accorder une réparation à toutes les victimes de disparition forcée, conformément aux dispositions du droits international en la matière.
- Modifier le système prévu par la Loi historique de la mémoire afin de cesser de déléguer la responsabilité des exhumations aux victimes.
- S'assurer de la collaboration de la Justice espagnole dans le cadre des procédures judiciaires menées dans d'autres pays, comme en Argentine.
- Modifier le sens et la signification de Valle de los Caídos et traiter les demandes des personnes demander de récupérer les dépouilles de leurs proches enterrées sur ce site sans leur consentement.
- Améliorer l'éducation en matière de Mémoire historique et droits de l'Homme.
Je ne pense pas générer beaucoup d'opposition en disant que les autorités espagnoles ne sont pas du tout arrivées à répondre à ces questions. Bien entendu, et beaucoup l'auront remarqué, nous ne sommes pas les seuls à soulever ces graves problèmes concernant les disparitions forcées. De nombreuses organisations internationales ont soumis ces questions à l'Espagne, comme c'est le cas du Comité des Nations Unies sur les disparitions forcées, du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou du Rapporteur spécial des Nations unies sur la Justice transnationale, qui tous s'inquiètent grandement de la situation dans le pays.
Les autorités espagnoles ignorent ces demandes depuis des années, donc il n'y a priori aucune raison de célébrer la journée du 30 août... Cependant, le nouveau gouvernement, dirigé par le Parti socialiste, a récemment annoncé du changement, ce qui pourrait représenté un virage radical et faire évoluer cette situation. Pour reprendre les propos de la nouvelle ministre de la Justice, l'Espagne devra "cesser d'être identifié comme un le principal transgresseur des résolutions internationales concernant le droit à la vérité, à la justice, à la réparation et les garanties de non-répétition".
De même, la ministre a fait explicitement référence à la situation insupportable des victimes des disparitions forcées, qui ont commencé à être perpétrées lors de la Guerre civile et durant le régime dictatorial franquiste. Une série de mesures spécifiques qui devraient approuvées dans les mois qui viennent ont déjà été annoncée, et dans une certaine mesure, ont été détaillées dans d'autres discours, tel que dans celui tenu par le nouveau directeur de la Direction générale de la Mémoire historique.
La vigilance est de mise
Ce qui a été annoncé par le gouvernement jusqu'à présent concerne six ou sept des recommandations énoncée au début de cet article. Cependant, les aspects liés au droit à la justice et à un traitement légal et judiciaire que devrait requérir un tel crime, n'ont été que partiellement mentionnés et dans des termes très généraux.
Aussi devons-nous être particulièrement vigilants sur ce point, et prendre notamment en compte le fait que le Parti socialiste n'a pas fait grand chose dans ce domaine par le passé. N'oublions pas qu'en Mars dernier, ces représentants se sont fermement opposés à la proposition d'amendement de la Loi espagnole sur d'Amnistie (l'amendement visait à ce que la loi n'inclut pas les disparitions forcées, l'un des crimes contre l'humanité les plus graves).
Sans toutefois baisser la garde, il est tout de même probable que le 30 août prochain, nous ayons quelque chose à célébrer lors de la Journée internationale des disparitions forcées. Mais nous devons continuer de travailler dur pour que tout ce qui a été annoncé se concrétise. De cette façon, peut-être, le jour viendra où les milliers de victimes des disparitions forcées recevront ce à quoi ils ont droit en Espagne, et pas seulement d'un point de vue judiciaire et légal.