Des organisations appellent à poursuivre en justice l'auteur pour le contenu de son livre
Le roman postmoderne Žali (les verts) raconte l'histoire de combattants de la liberté lituaniens dans des situations du quotidien et comprend quelques passages comiques. Cette représentation postmoderne des "partisans" a provoqué la colère d'organisations dont la mission est de promouvoir et défendre l'héritage historique du pays. Quand l'auteur du livre, Marius Ivaškevičius s'est vu remettre le Prix national de l'Art et de la culture en 2018, ces organisations ont demandé aux procureurs d'ouvrir une enquête préliminaire sur le contenu en question pour déni ou minimisation des crimes des Nazis et des Soviétiques contre la République de Lituanie et son peuple, et pour insulte à la mémoire des personnes décédées.
Les procureurs rejettent la requête
Le Bureau du procureur a rejeté cette requête, faisant remarquer que la liberté d'expression est l'une des fondations sur lesquelles toute démocratie est construite, et que le code pénal ne peut être utilisé que contre des livres qui promeuvent la haine nationale, raciale, religieuse ou social, incitent à la violence et à la discrimination, dans des cas de diffamation et désinformation, et quant il est nécessaire de protéger la vie, la vie privée, la décence publique et l'ordre constitutionnel.
Les organisations ont fait appel de la décision du Tribunal régional de Vilnius.
Les juges rejettent l'appel
L'appel a été rejeté par un comité de juges, qui ont estimé que, en démocratie, les auteurs de travaux littéraires doivent jouir d'une grande liberté dans leur imagination et expression artistique. Les écrivain.e.s ont le droit d'exprimer leur opinion sur toutes les thématiques, même lorsqu'elles constituent un sujet sensible.
Le tribunal s'est également appuyé sur la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme et du Tribunal constitutionnel de Lituanie, déclarant que poursuivre en justice les écrivain.e.s pour des travaux littéraires est la marque de fabrique des régimes totalitaires, et non des démocraties. Dans le cadre du droit pénal, ces poursuites ne peuvent pas être considérées comme une utltima ratio (une mesure de dernier recours). Toute poursuite représenterait une réponse inappropriée à un travail littéraire, à la créativité et liberté d'expression.
Enfin, la Cour n'accepte pas les arguments des appelants selon lesquels l'auteur aurait minimiser l'idée de la résistance, qui était très importante dans le pays. The poursuite de l'écrivain pour ce travail irait à l'encontre des idéaux mêmes d'une Lituanie libre pour laquelle les partisans se sont justement battus.
Plus d'infos ici (en lituanien).