Dans le cadre de deux recours en annulation introduits indépendamment, la Cour constitutionnelle a statué aujourd’hui contre la conservation généralisée des métadonnées de communication. Cette décision s’inscrit dans la droite ligne d’un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) invalidant la directive à l’origine de la loi belge.
La directive sur la conservation des données (2006/24/CE), adoptée suite aux attentats de Madrid (2004) et de Londres (2005), contraignait les opérateurs de télécommunication et les fournisseurs d’accès à Internet européens à conserver les métadonnées de communication de leurs usagers.
[0]http://nurpa.be/actualites/2014/04/directive-data-retention-invalidee
En juillet 2013, le Parlement fédéral adoptait, dans le cadre d’une procédure d’urgence, une loi et un arrêté transposant cette directive en droit belge [1]. Cette loi et son arrêté d'application contraignaient les fournisseurs de services de communications électroniques à conserver, pour une durée de un an, de multiples données, telles que les numéros de téléphone appelés depuis un téléphone mobile, la localisation géographique de l’émission de l’appel, la date, l’heure et la durée des communications, etc., sans toutefois que le contenu de ces dernières ne soit traité.
[1]http://nurpa.be/actualites/2013/12/avis-CJUE-data-retention#contexte-belge
La Cour et les citoyens réafirment l'importance du droit à la vie privée
En février 2014, la Ligue des droits de l’Homme (LDH), la NURPA, datapanik.org et la Liga voor Mensenrechten initiaient conjointement une campagne de crowdfunding visant à financer une procédure de recours en annulation auprès de la Cour constitutionnelle [2]. L’accueil reçu par la campagne – l’objectif des 5000 € ayant été dépassé en quelques semaines – a démontré, si cela était encore nécessaire, à quel point les citoyens sont attachés à leur vie privée et au respect de celle-ci.
[2]http://stopdataretention.be/fr/
La Cour réaffirme ainsi l’importance du droit à la vie privée, énoncé par l’article 22 de la constitution belge, et rappelle quel toute limitation de ce droit doit faire l’objet d’un encadrement strict.
La Belgique rejoint, grâce à cette décision, la longue liste des États membres au sein desquels la transposition nationale de la directive a été contestée avec succès [3]. Il est à noter que la Commission européenne ne projette pas d’introduire une nouvelle proposition portant sur la conservation des métadonnées de communication [4].
[3]http://wiki.vorratsdatenspeicherung.de/Transposition
[4]http://www.reuters.com/article/2015/03/12/us-eu-data-telecommunications-idUSKBN0M82CO20150312
Pour Alexis Deswaef, Président de la LDH, "cet arrêt constitutionnel doit avoir l'effet d'un électrochoc pour nos Gouvernements: ils ne peuvent pas élargir à l'infini la surveillance de masse de leurs citoyens".
Cet arrêt réjouissant de la Cour constitutionnelle rappelle que la vie privée constitue encore un droit fondamental qui ne peut être limité à la légère.