La mission du "Mare Ionio"
Le bateau de sauvetage Mare Ionio a pris les voiles le 4 octobre dernier depuis la ville d'Augusta, et s'est dirigé au centre de la mer Méditerranée. Arrivé dans les eaux internationales, il s'est dirigé vers la zone de sauvetage et de recherche au large des côtes libyennes. L'équipage compte 11 membres et la capacité du navire est de 100 personnes à bord. Le bateau était suivi par deux autres bateaux au bord desquels se trouvaient des journalistes et par le navire Astral, appartenant à l'ONG espagnole Open Arms (Bras ouverts), qui a aussi pour mission d'apporter un soutien technique. Le fondateur de l'ONG est également à bord.
Un groupe de plusieurs ONG, dont Sea-Watch et Open Arms, d'associations comme Ya Basta ou encore Arci Nazionale, membre de la Coalition italienne des libertés civiles, et certains représentants politiques italiens (Erasmo Palazzotto, Nicola Fratoianni, Nichi Vendola, Rossella Muroni), ont décidé de lancer la mission "Mediterranea", afin de mettre en lumière ce que se passe sur l'une des routes maritimes les plus dangereuses et meurtrières du monde : celle qui va de la Libye à l'Italie.
Toujours plus de morts en mer
Selon les dernières données de l'Institut international des Études politiques (IIEP), une personne sur cinq empruntant cette route, au départ des côtes libyennes, est morte. Et plus de la moitié des personnes migrantes ont été interceptées par les patrouilles navales libyennes et ramené en Libye. La politique de dissuasion du gouvernement italien a entraîné une réduction des arrivées sur les côtes italiennes, mais a aussi conduit à une hausse du nombre de morts et de personnes disparues. Selon l'Organisation internationale pour la migration, depuis 2013, au moins 15 000 personnes sont mortes dans cette partie de la Méditerranée.
Mediterranea sera la seule mission de sauvetage en mer, puisque le bateau Aquarius de SOS Méditerranée et Médecins sans frontière est arrivé à Marseille et devra cesser de naviguer après que le Panama a retiré son pavillon. Dans le même temps, deux autres bateaux humanitaires ont été bloqués des mois durant par les autorités maltaises dans le port de Valletta, sur l'île. De plus, le bateau espagnol Open Arms s'est dirigé vers la partie occidentale de la Méditerranée, sur la route qui va du Maroc en Espagne.
Les politiques italiennes alimentent la xénophobie et le racisme
"Depuis juin dernier, près de mille personnes sont mortes en Méditerranée centrale, après que le gouvernement italien a fermé l'accès aux ports aux bateaux appartenants aux ONG. Cela a coïncidé avec un climat de hausse de la xénophobie et du racisme, alimentés par des politiques de plus en plus inhumaines, qui explique pourquoi certains d'entre nous ont décidé de lancer un bateau italien avec le pavillon italien et faire comprendre que dans ce pays il existe encore certaines personnes qui veulent se battre pour sauver des vies", a indiqué le député de Liberi e Uguali , Erasmo Palazzotto, qui a pris place à bord du bateau.
"Dans une situation qui, d'une part, voit une tragédie sans fin se produire en Méditerranée, à quelques kilomètres de nos côtes, et d'autres part la mystification de la réalité avec l'avancée agressive du racisme et du nationalisme, notre chois est de s'engager et agir concrètement", ont déclaré les organisateurs.trices du projet Mediterranea dans un communiqué. Être présent là où celles et ceux qui font face à d'énorme dangers en mer et risquent leur vie ; pour nous, c'est le bon choix à faire. C'est le seul choix pour celles et ceux qui ne cèdent pas à une Italie et une Europe intolérante, complice et indifférente, qui ferme l'accès à ses ports. Pour cette raison, nous avons choisi d'embarquer et suivre le cours de la civilisation".
Une mission de "désobéissance morale et obéissance civile"
Pour financer la mission, des parlementaires ont demandé un prêt de 46500 euros à la Banque Etica, et 140000 euros ont été levés grâce à une campagne de crowdfunding. "Mediterranea est une initiative non gouvernementale de désobéissance morale et d'obéissance civile, qui réunit de nombreuses associations et ONG, telles que Arci, Ya Basta Bologne, Sea-Watch, le magazine I Diavoli, les entreprises sociales comme Moltivolti (Palerme). Les garant.e.s de cette opération de sauvetage sont Nicola Fratoianni, Rossella Muroni, Erasmo Palazzotto et Nichi Vendola", conclut le communiqué de presse. "L'idée est née en juillet, lorsque les autorités ont commencé à fermer l'accès aux ports. Puis elle a été renforcée par l'affaire Diciotti en août. Le pavillon italien, qui devrait nous permettre d'entrer dans les ports italiens, est une manoeuvre juridique visant à ce que les ports italiens sont de nouveau ouverts", conclut Palazzotto.