La liberté de presse et la liberté d'expression restreintes par le gouvernement
Les amendements proposés à la Loi sur la protection des consommateurs ont fait leur entrée au Parlement lituanien l'an passé. Ces amendements visaient à interdire la vente de viens qui "violent potentiellement les intérêts de la République de Lituanie", qui prétendument déforment les faits historiques et dégradent l'histoire du pays. Les interdictions auraient également pu s'appliquer aux livres et autres publications.
Dans ses observations, l'Institut d'observation des droits humains (IODH) a noté que cette interdiction visait à établir une seule interprétation "officielle" de l'histoire du pays, ce qui va à l'encontre de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme de Strasbourg (CrEDH). La CrEDH insiste effectivement sur la nécessité d'avoir des discussions ouvertes sur les questions historiques. Le Parlement a finalement pris en compte ces remarques, et annulé les amendements.
Plus tard, le Ministre de l'Intérieur a proposé des amendements à la Loi sur la Protection VIP, dont le but est d'assurer la protection de l'autorité des dirigeants du pays. Les amendements avaient aussi pour but de permettre aux membres des Services de la protection VUP d'éliminer les facteurs de risques qui pouvaient avoir un impact sur l'autorité des dirigeants politiques lituanien.n.e.s.
L'IODH souligne que les amendements étaient contraires à la fois à la Constitution du pays et aux traités internationaux, les interdictions générales de la diffusion d'informations étant incompatibles avec les normes internationales sur les restrictions sur la liberté d'expression. La CrEDH avait également déclaré que les restrictions de la liberté d'expression devaient être interprétées de manière restrictive et être définies avec précision.
Le journalisme indépendant aura lui aussi été durement frappé, le Centre national des registres ayant mis un terme à sa pratique visant à fournir des données aux journalistes à des fins d'information publique. L'indignation du public s'est concentrée sur le décision prise le gouvernement de ne pas approuver un projet de loi qui aurait permis aux journalistes de recevoir des informations du Centre. Et l'enregistrement audio de cette réunion a été détruit.
La décision aura entraîné un vif débat public, et en conséquence, il a été décidé que l'enregistrement audio était bien un document d'intérêt public. Plusieurs centaines de personnes s'étaient rassemblées devant le siège du gouvernement en vue de défendre la liberté de la presse, et l'accès au Registre a finalement été réouvert.
Les libertés personnelles aussi ciblées
En 2018, une nouvelle proposition de loi visant à interdire l'avortement aura aussi été soumise au Parlement, lors de la session du printemps. En vertu de cet amendement proposé, les femmes auraient dû continuer leur grossesse jusqu'à leur terme, même en cas de grave déficience du foetus.
Cet amendement aurait aussi laissé aux médecins la responsabilité d'établir les menaces pour la santé de la femme ou de l'enfant ou la présence de possibles violences ou abus sexuels chez les femmes demandant à avorter. Et cela aurait conduit les médecins à exiger des preuves de ces faits, et els aurait décourager à conduire des avortements, ce qui aurait pénalisé les femmes aux revenus les plus faibles, les plus riches pouvant réaliser leur avortement à l'étranger.
Comme autre exemple de la façon dont les libertés personnelles ont été réduites, nous pouvons aussi citer le traitement par la police des suspects d'infractions liées aux drogues. Les opérations policières disproportionnées menées au cours de raids dans des boîtes de nuit ont entraîné de nombreuses violations des droits fondamentaux et notamment du respect de la vie privée.
Les violences conjugales et domestiques à l'encontre des femmes au centre de l'attention
En 2018, la nécessité de changer les attitudes du grand public envers les violences domestiques a constitué un sujet brûlant en Lituanie. Une étude de l'IODH a montré que les femmes victimes de violences étaient moins susceptibles de reconnaître les violences économiques et sexuelles, ce qui est principalement lié aux rôles de genre traditionnels. L'étude montre aussi que de nombreuses femmes ont eu des expériences négatives avec des spécialistes qui auraient dû les aider, et de nombreuses femmes ont aussi dû se confronter au "victim blaming" : à des situations où la faute est rejetée sur la victime.
Une personne sur deux en Lituanie pense encore qu'une femme victime de violences savait dans quel type de relation elle s'engageait, et le même pourcentage de personnes pense que les femmes provoquent elles-mêmes ces violences. Une campagne de sensibilisation menée à la fin de l'année, intitulée Soutenez-les, cherchait à attirer l'attention du public sur le faut que les violences faites aux femmes ne sont pas une problème isolé mais bien un problème qui touche toute la société, qui nécessite donc une compréhension de toute la société dans son ensemble et non pas des seuls spécialistes, policier.e.s ou professionnel.l.e.s de santé. Comme avancée positive, notons tout de même que la présidente lituanienne, Dalia Grybauskaitė, a soumis la Convention d'Istanbul sur la prévention des violences faites aux femmes au Parlement, afin qu'elle soit ratifiée.
Enfin, nous pouvons nous réjouir du fait qu'aucune des initiatives prohibitives mentionnées ici n'ait réellement remporté une véritable adhérence sur le plan juridique. Les manifestations publiques tout au long de l'année ont montré que les citoyen.n.e.s sont loin d'être inutiles quand il s'agit de contrer les tentatives des politiques visant à restreindre les droits humains. Le sentiment de responsabilité, envers nous-mêmes et envers les autres, nous aidera à relever d'autres défis pour les droits humains dans le futur.