La Cour constitutionnelle de la République italienne a tranché : la culture de cannabis destinée à un usage personnel représente toujours une infraction. Cette décision ne fait que renforcer le paradoxe juridique qui entoure la prohibition de la drogue puisque celle-ci pousse les consommateurs à se tourner vers le marché illégal.
La Cour constitutionnelle a confirmé que la culture du cannabis pour usage personnel constitue une infraction aux yeux de loi italienne. En réalité, la question de la constitutionnalité de la sanction applicable en cas de culture de cannabis pour usage personnel (introduite par la Cour d'appel de Brescia) n'a même pas été jugée recevable par la Cour constitutionnelle.
Dans l'état actuel des choses, la loi italienne est inconcevable : cultiver du cannabis pour son propre usage constitue une infraction pénale mais l'acheter illégalement constitue seulement une infraction administrative. La cour de Brescia a fait remarquer cette incohérence du point de vue du principe juridique, et considérant le niveau de gravité de l'infraction.
La décision de la Cour constitutionnelle n'a pas permis de résoudre ce paradoxe, et par conséquent, la situation reste insoutenable. Si quelqu'un souhaite consommer du cannabis et en minimiser les risques, il lui est plus avantageux d'en acheter illicitement plutôt que de le cultiver chez lui, soutenant donc indirectement les réseaux criminels.
Réformer les politiques antidrogues
Ce n'est pas la première fois que la Cour constitutionnelle rejette une exception d'inconstitutionnalité. En 1995, la cour avait déjà estimé que la dépénalisation de la culture pour usage personnel entraînerait une augmentation de la quantité de drogues disponibles en Italie.
Au cours de la dernière décennie, la situation n'a pas beaucoup évolué. "Interdire, punir, sanctionner, arrêter, juger et emprisonner" : voilà à quoi se résume l'actuelle politique antidrogues, pour repndre les dires de Patrizio Gonnela, président de l'association Antigone.
Les politiques antidrogues en Italie devraient être réformées, et suivrent l'exemple donné par certains États américains ou le Portugal, qui ont fournit des efforts fructueux en matière légalisation et de décriminalisation des drogues. Par ailleurs, les chiffre parlent d'eux-mêmes : entre 2006 et 2014, 250 000 personnes ont été arrêtées en Italie pour des infractions liées à la drogue. Quant aux dépenses annuelles pour garder les délinquants en prison, elles s'élèvent à un milliard d'euros.
L'Italie est désormais confrontée à un choix crucial : faut-il poursuivre cette politique prohibitionniste qui a déjà coûté la vie à des milliers de personnes, ou bien au contraire, faut-il changer radicalement d'approche vis à vis des drogues ? Deux grandes opportunités de réflexion et de réformes se profilent à l'horizon : la discussion d'une nouvelle loi au Parlement proposée par le groupe "Cannabis Legale"; et la prochaine session extraordinaire de l'Assemblée générale des Nations Unies consacrée aux politiques antidrogues. L'Italie changera-t-elle enfin de stratégie ?